Pourquoi la mère, et non le père, est elle génératrice de tous les champions ?
Des chercheurs britanniques ont identifié un gène de la vitesse chez les pur-sang, hérité d’une jument à la fin du XIXème siècle.
Pourquoi les pur-sang trustent-ils les lignes de départ des hippodromes ? Parce que, depuis plus de 300 ans, cette race est spécifiquement sélectionnée pour ses prouesses en course. Une sélection empirique, mais dont on vient de découvrir qu’elle avait une assise génétique ! Un « gène de la vitesse » semble en effet en partie responsable des hautes performances de ces chevaux.
Ce gène de la myostatine est impliqué dans la croissance et la différenciation des cellules musculaires. En 2010, on avait déjà découvert qu’il en existe deux variantes : la version T est associée à l’endurance, alors que la version C est plutôt synonyme de vitesse pure et de développement précoce de la masse musculaire.
C’est la seconde qui est l’apanage des grands champions actuels, de très jeunes sprinteurs. Mais pour comprendre son origine et la manière dont elle s’est propagée, des archéogénéticiens britanniques ont analysé les génomes de plusieurs centaines de chevaux : des pur-sang actuels mais aussi les pères fondateurs de la race et des chevaux d’autres races.
Contre toute attente, ils ont découvert que le « gène de la vitesse » (la variante C) n’existait pas chez les étalons d’origine, au XVIIIème siècle. Il ne se serait propagé qu’à partir de la seconde moitié du XIXème siècle. Or, à cette époque, la distance des courses de chevaux a été ramenée à moins de 2000 mètres, alors qu’elle était plutôt de 3000 à 6000 mètres auparavant. Les chevaux rapides et plus jeunes ont alors été préférés aux chevaux endurants.
Plus surprenant, les chercheurs estiment que la variante C ne serait pas apparue avec un étalon mais avec une jument ! Or de tous temps, ce sont majoritairement les étalons qui sont sélectionnés pour la reproduction et non les juments …
Encore plus surprenant, la race dans laquelle la proportion de gènes de type C est aujourd’hui la plus importante est … le shetland, un poney robuste et de petite taille très apprécié des enfants ! « C’est une race locale apparentée aux chevaux de course qui existait bien avant que le pur-sang soit créé », expliquent les chercheurs.
Avec ces résultats, les éleveurs pourraient à l’avenir ajouter un critère génétique dans leur sélection. Mais la science prendra-t-elle le pas sur la tradition ? Rien n’est moins sûr.
Emilie Gillet
Sciences et Avenir – Mars 2012
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